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Violences conjugales et confinement : Séquestration avec votre bourreau ? « Il n’est pas interdit de fuir ! »

Depuis plusieurs mois maintenant, l’épidémie de coronavirus « COVID19 » sévit sur la scène internationale. Face à cette pandémie, différents pays ont adopté des mesures de confinement pour leurs populations.

En France, depuis le 17 mars 2020 à 12h, les français sont confinés chez eux. Un décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 « prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire » (précisé par le décret n° 2020-314 du 25 mars 2020) fixe les modalités dudit confinement. Conformément à ce texte, les sorties sont naturellement très limitées. Il est possible de sortir avec son attestation de déplacement dérogatoire, notamment pour pratiquer une activité sportive individuelle « dans la limite d’une heure quotidienne et dans un rayon maximal d’un kilomètre autour du domicile (…) », mais aussi pour aller faire ses courses ou se rendre à la pharmacie.

Bien que le confinement soit difficile pour la grande majorité des français, il l’est encore plus pour les femmes (et les hommes) victimes de violences conjugales. En effet, compte tenu du huis-clos familial, les victimes de violences n’ont plus aucun moment de répit et une vie sociale inexistante. Elles ne peuvent donc plus profiter d’un moment d’accalmie lorsque leur conjoint est à l’extérieur ou au travail. Le risque d’augmentation des violences est donc bien
réel.

D’ailleurs, la Chine, qui a connu l’épidémie de coronavirus avant la France, demeure une illustration saisissante de ce contraste : les violences intrafamiliales auraient été multipliées par trois entre le début et la fin du confinement.

Le confinement n’est donc pas considéré comme créateur de violences, mais comme un facteur d’aggravation. À ce titre, Caroline Chau, présidente de l’association pour l’accueil des femmes en difficulté (Apafed) résume cela dans les termes suivants :
« Le confinement est une mesure aggravante de leur situation de victime. Elles sont surexposées aux violences et ne disposent plus du temps, de l’espace nécessaire pour prendre la fuite ou appeler à l’aide ».

Le risque est donc une escalade dans le cycle de la violence. Il peut s’agir, par exemple, de violences psychologiques qui deviennent physiques ou sexuelles. De plus, certains tyrans passent à l’acte quand ils sont sous l’emprise de produits stupéfiants ou d’alcool. Le fait de ne plus avoir de contraintes professionnelles en allant au travail (le télé-travail laissant tout de même plus de liberté), certains seront tentés de consommer davantage ce type de produits, impliquant de facto, des actes de violences plus fréquents et d’une intensité plus grave.
Concrètement, quelles sont les solutions pour aider les victimes de violences conjugales confinées avec leur bourreau ?

En Espagne, des solutions ont été mises en place pour aider les victimes de violences conjugales dans cette période délicate. À ce titre, un service de messagerie instantanée avec géolocalisation et assistance psychologique si la victime reste à son domicile est prévu. De plus, les victimes peuvent aller à la pharmacie et simplement dire « Mascarilla 19 » (Masque 19) pour donner l’alerte rapidement.

En France, des mesures similaires tendent à être adoptées. Actuellement, pour prévenir et lutter contre les violences conjugales, il faut garder à l’esprit les éléments suivants :

– Des contacts à maintenir
Dans votre entourage, vous connaissez peut-être des personnes qui vivent – ou que vous soupçonnez de vivre – avec un conjoint ou un partenaire violent. C’est le moment de garder un contact régulier avec les potentielles victimes.

Toutefois, certains conjoints contrôlent absolument toutes les conversations téléphoniques et parfois même les messages de leur victime. Il faut donc savoir parfois lire entre les lignes bien que cela ne soit pas toujours chose aisée.

– Des dispositifs d’aide mis en place
Bien entendu, les victimes de violences conjugales sont confinées avec leur bourreau et parfois même avec leurs enfants qui assistent aux violences ou les subissent également. Si les sorties sont limitées, il est tout à fait possible d’aller demander de l’aide en sortant et en ayant préalablement rempli son attestation. Pour ce faire, il peut être opportun d’aller demander de l’aide auprès d’un professionnel de santé, comme les pharmaciens. En effet, à l’instar de l’Espagne, depuis le 26 mars 2020, Monsieur Christophe Castaner, Ministre de l’intérieur, a annoncé la mise en place d’un dispositif d’alerte dans les pharmacies. À ce titre, le 28 mars dernier, à Nancy, une victime a pu donner l’alerte dans une pharmacie. Ce dispositif peut donc être efficace.

Les voisins doivent aussi faire preuve de bon sens et prévenir les forces de l’ordre s’ils entendent des cris. Cela semble être élémentaire mais force est de constater que ce n’est pas du tout le cas à chaque fois. Laisser quelqu’un être violenté tout en en ayant pleinement
conscience, est constitutif du délit de non-assistance à personne en danger (article 223-6 du Code pénal).

– Des dispositifs juridiques maintenus
L’activité judiciaire des tribunaux est, pour certains contentieux, suspendue. Néanmoins, et malgré l’état d’urgence sanitaire, il est possible d’obtenir une ordonnance de protection. Conformément à l’article 515-9 du Code civil : « Lorsque les violences exercées au sein du couple, y compris lorsqu’il n’y a pas de cohabitation, ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin, y compris lorsqu’il n’y a jamais eu de cohabitation, mettent en danger la personne qui en est victime, un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une
ordonnance de protection ».

Cette ordonnance permet notamment d’interdire à l’agresseur d’entrer en contact avec sa victime, de se rendre dans certains lieux et de se prononcer sur l’attribution du logement conjugal mais aussi de prendre des mesures pour les enfants (article 515-11 du Code civil).

Cette ordonnance est valable pour une durée de six mois. Ce délai ne peut être prolongé que si une requête en divorce, une demande en séparation de corps a été déposée pendant ces six mois, ou encore si le Juge aux affaires familiales est saisi d’une requête relative à l’autorité parentale (article 515-12 du Code civil).

Les avocats sont là pour aider les personnes victimes de violences conjugales à obtenir cette ordonnance de protection et pour les aider dans leurs démarches. Le Conseil National des Barreaux a également mis en place des consultations gratuites pour vous permettre de parler avec un avocat : https://www.cnb.avocat.fr/fr/annuaire-barreaux

– Des numéros et adresses d’urgence à disposition

Il existe plusieurs moyens d’appeler à l’aide :

Par téléphone et SMS :
– 17 ou le 112 pour contacter la police ou la gendarmerie ;
– 114 pour écrire par SMS (numéro actif 24/24h et 7j/7) ;
– 3919 : Violences femmes info (sauf le WK) ;
– 116006 : Numéro d’aide aux victimes de tout type de violence ;
– 18 (pompier) / 15 (SAMU) ;

Néanmoins, quand la victime est confinée avec son agresseur, il peut être difficile de passer un appel téléphonique. Par conséquent, accéder à Internet si celui-ci n’est pas sous contrôle peut être une alternative intéressante.

Par Internet :
– Arretonslesviolences.gouv.fr : accessible 24h/24 : permet de dialoguer de façon
anonyme avec les forces de l’ordre ;
– victimes@france-victimes.fr : mail de l’Aide aux victimes de tout type de violence ;
– Sur les réseaux sociaux : si vous avez un compte Facebook, Instagram, Twitter.

Pour les enfants en difficulté, le numéro 103 est accessible de 10h à 0h tous les jours. En effet, l’école leur permet parfois de se confier et de trouver des solutions pour contrer les difficultés rencontrées chez eux, là, ce n’est plus possible durant tout le confinement.

CategoryDivorce
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