
Le délit d’abandon famille est le fait de ne pas honorer une obligation familiale prévue par une décision pendant une durée d’au moins deux mois. Il peut s’agir, par exemple, du non-paiement de la pension alimentaire ou de la prestation compensatoire.
1 – Les conditions
- Une décision
Pour que le délit d’abandon de famille soit caractérisé, il faut qu’il y ait une obligation alimentaire prévue par une décision[1].
La décision prévoyant l’obligation alimentaire peut être un jugement, une convention judiciaire homologuée, une convention de divorce ou de séparation de corps, un acte reçu en la forme authentique par un notaire ou encore une convention à laquelle l’organisme débiteur des prestations familiales a donné force exécutoire (pour les ex-concubins ou partenaires de PACS[2])[3].
Précisons que la décision doit être définitive (la procédure ne doit pas être en appel) et exécutoire[4]. Il faut donc que la personne débitrice de l’obligation en ait connaissance, cela implique généralement une signification par voie d’huissier.
- Une obligation familiale
La décision doit prévoir explicitement une obligation familiale. Il peut s’agir du paiement d’une pension alimentaire. Celle-ci peut être destinée à un enfant (mineur ou majeur) mais aussi à un ascendant ou à un conjoint.
Enfin, l’obligation familiale recouvre aussi toute prestation ou contribution familiale. Cela peut englober notamment le paiement d’une prestation compensatoire ou d’un devoir de secours dans le cadre d’un divorce.
- Un défaut de paiement
Le défaut de paiement est caractérisé lorsque l’obligation alimentaire n’a pas été honorée intégralement pendant un délai d’au moins deux mois. Ainsi, en cas de paiement partiel, le délit d’abandon de famille peut tout de même être caractérisé.
Précisons que le paiement doit être fait directement au bénéficiaire et non à un tiers. En ce sens, il a été jugé que le délit d’abandon de famille était caractérisé lorsqu’un père versait la pension alimentaire à l’un de ses enfants au lieu de la verser à leur mère[5].
Si le débiteur ne s’acquitte pas de sa dette pendant ces deux mois puis l’honore ultérieurement, cela n’empêche pas la qualification de délit d’abandon de famille[6].
- Une absence de paiement délibérée
Le non-paiement de l’obligation alimentaire doit être volontaire. Il faut que le débiteur ait connaissance de son obligation mais refuse de s’en acquitter.
En revanche, si la personne débitrice ne s’acquitte pas du paiement intégral en raison d’une impossibilité matérielle, cette condition n’est bien entendu pas remplie. Toutefois, l’impossibilité matérielle est souvent appréciée assez strictement par les juridictions.
Précisons enfin qu’il a été jugé que le paiement d’une pension alimentaire était prioritaire sur toutes les autres dépenses[7].
2 – Les recours
S’agissant d’une infraction pénale, il faut saisir le tribunal correctionnel du lieu de l’infraction, de la résidence du prévenu (ou celui du lieu d’arrestation ou de détention de ce dernier) ou encore du domicile/résidence de la personne qui doit recevoir la pension, la contribution, les subsides ou l’une des autres prestations[8].
Peuvent engager des poursuites concernant le délit d’abandon de famille :
- Le ministère public ;
- La victime (le bénéficiaire) ;
- Une association reconnue d’utilité publique.
Si les conditions précitées sont remplies, la personne victime du défaut de paiement peut porter plainte auprès d’un commissariat ou d’une brigade de gendarmerie. La plainte peut également être adressée directement au procureur de la République.
Pour plus de rapidité, il est possible d’opter pour une citation directe. Précisons que dans cette configuration, le Tribunal demande le versement d’une certaine somme en guise de consignation, dans le but d’éviter les procédures abusives ou dilatoires.
3– Les sanctions
L’auteur d’un délit d’abandon de famille encourt deux ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende[9].
Si le débiteur d’une obligation familiale ne prévient pas le bénéficiaire qu’il change de domicile dans un délai d’un mois, la peine est de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende[10].
Ces sanctions peuvent être assorties de peines dites complémentaires. Il peut s’agir, par exemple, « d’interdiction, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habit
[1]. Cass, crim., 14 février 1984, n°82-91.119.
[2]. Article 582-2 du Code de la sécurité sociale.
[3]. Article 373-2-2 du Code civil.
[4]. Cass, crim., 14 février 1984, n°82-91.119.
[5]. Cass, crim., 26 octobre 2005, pourvoi n° 05-81.053.
[6]. Cass, crim., 23 mars 1981, n° 74-94.340.
[7]. Cass, crim., 20 juin 2018, n°17-86.732.
[8]. Article 382 du Code de procédure pénale.
[9]. Article 227-3 du Code pénal.
[10]. Article 227-4 du Code pénal.